LE CYCLE HUMAIN



TABLE DES MATIÈRES:

1. Le Cycle Social
2. L'Age de l'Individualisme et de la Raison
3. L'Avènement de l'Age Subjective
4. La Découverte de l'Ame nationale
5. Le Vrai et le Faux Subjectivisme
6. Les Conceptions Objective et Subjective de la Vie
7. La Loi Idéale du Développment Social
8. Civilisation et Barbarie
9. Civilisation et Culture
10. Culture Esthétique et Culture Morale
11. La Raison en tant que Principe Directeur de la Vie
12. La Fonction de la Raison et ses Limitations
13. Raison et Religion
14. La Beauté Suprarationelle
15. Le Bien Suprarationelle
16. L'Aboutissement Suprarationell de la Vie
17. La Religion en tant que Loi de la Vie
18. L'Age Infrarationell de Cycle
19. La Courbe de l'Age Rationel
20. La Fin de la courbe de la Raison
21. Le But Spirituel et la Vie
22. La Nécessité de la Transformation spirituelle
23. Les Conditions de l'Avènement d'un Age Spirituel
24. L'Avènement et le Progrès de l'Age Spirituel


 

Le Cycle Social (Excerpt)

 

La science moderne, obsédée par la grandeur de ses découvertes physiques et par l'idée de l'unique existence de la matière, a pendant longtemps essayé de fonder ses recherches sur des données physiques, y compris son étude de l'âme et du mental et celle des opérations de la Nature dans l'homme et l'animal, où pourtant la connaissance de la psychologie est aussi importante que celle des sciences physiques. Sa psychologie elle-même s'est fondée sur la physiologie et sur l'étude minutieuse du cerveau et du système nerveux. Il n'est donc pas étonnant qu'en histoire et en sociologie, l'attention se soit concentrée sur les données extérieures, les lois, les institutions, les rites, les coutumes, les facteurs et les développements économiques, tandis qu'on négligeait fort les éléments plus profonds de la psychologie, pourtant si importants dans les activités d'un être mental, émotif et idéateur comme l'homme. Ce genre de science veut expliquer, autant qu'il se peut, l'histoire et le développement social par des nécessités ou des motifs économiques, par l'économie au sens le plus large. Il se trouve même des historiens pour nier ou écarter comme ayant une importance tout à fait subsidiaire, l'action des idées et l'influence du penseur sur le développement des institutions humaines. La Révolution française, pensent-ils, se serait produite juste au même moment et de la même manière ­ sous l'effet d'une nécessité économique ­ si Rousseau et Voltaire n'avaient jamais écrit et si le mouvement philosophique du dixhuitième siècle dans le monde de la pensée n'avait pas conçu ses spéculations hardies et radicales.

Récemment, on a cependant commencé à douter que la matière puisse à elle seule expliquer le mental et l'âme; un mouvement d'émancipation s'est amorcé, qui cherche à nous délivrer de l'obsession des sciences physiques, quoique, pour le moment, il ne soit guère allé au-delà de quelques balbutiements maladroits et rudimentaires. On commence malgré tout à percevoir que derrière les motifs et les causes économiques du développement social et historique, il existe des facteurs psychologiques profonds, peut-être même des facteurs psychiques. Dans l'Allemagne d'avant-guerre, métropole du rationalisme et du matérialisme ­ mais aussi berceau, depuis un siècle et demi, de pensées nouvelles et de tendances originales, bonnes et mauvaises, bienfaisantes et désastreuses ­, une première théorie psychologique de l'histoire a été conçue et exposée par une intelligence originale. Les premières tentatives dans un domaine nouveau sont rarement tout à fait réussies; ainsi, l'historien allemand auteur de cette théorie, a saisi une idée lumineuse, mais il n'a pas été capable de la pousser très loin ni de la creuser profondément. Il était encore hanté par l'idée de l'importance capitale des facteurs économiques, et, comme la plupart des sciences européennes, sa théorie exposait, classait et organisait les phénomènes avec beaucoup plus de succès qu'elle ne les expliquait. Quoi qu'il en soit, son idée fondamentale formulait une vérité suggestive et illuminatrice, et certains de ses aperçus méritent d'être suivis, notamment à la lumière de la pensée et de l'expérience orientales.

L'auteur de cette théorie, Lamprecht, s'appuyant sur l'histoire européenne et particulièrement celle de l'Allemagne, suppose que le progrès de la société humaine traverse certaines étapes psychologiques distinctes, qu'il appelle respectivement symbolique, typale, conventionnelle, individualiste et subjective. Cette progression forme ainsi une sorte de cycle psychologique par lequel toute nation ou civilisation doit nécessairement passer. Bien entendu, toutes les classifications de ce genre risquent de pécher par rigidité, voulant substituer aux spirales et aux zigzags de la Nature, la ligne droite du mental. La psychologie de l'homme et des sociétés est trop complexe, ses tendances diverses et entremêlées forment une synthèse trop poussée pour se prêter à une analyse formelle aussi rigoureuse. Cette théorie du cycle psychologique ne nous dit pas non plus le sens intérieur de ses phases successives, ni la nécessité de leur succession, ni le terme, le but vers lequel elles s'acheminent. Cependant, pour comprendre les lois naturelles, qu'elles soient mentales ou matérielles, il est nécessaire d'analyser leur fonctionnement en ses éléments discernables, ses composants principaux, ses forces dominantes, encore qu'on ne les trouve réellement nulle part à l'état isolé. Je laisserai de côté la manière dont ce penseur occidental expose son idée. Les noms suggestifs qu'il nous offre, si nous examinons leur sens et leur valeur intrinsèques, peuvent cependant jeter quelque lumière sur le secret lourdement voilé de notre évolution historique, et de fait, c'est dans cette direction qu'il serait le plus utile de faire des investigations.

Sans doute, chaque fois que nous pouvons saisir la société humaine en ce qui nous semble ses tout premiers débuts ou ses phases primitives ­ peu importe que la race soit relativement cultivée ou sauvage, qu'elle soit économiquement avancée ou arriérée ­, nous découvrons qu'une mentalité fortement symbolique gouverne, ou du moins imprègne ses pensées, ses coutumes et ses institutions. Symbolique, mais de quoi? Nous observons qu'à ce stade du développement social la société est toujours religieuse et activement imaginative dans sa religion, car le symbolisme et un sentiment religieux général, imaginatif ou intuitif, ont une parenté naturelle et vont toujours de pair, surtout dans les formations anciennes ou primitives. Quand, d'une façon prédominante, l'homme commence à être intellectuel, sceptique et raisonneur, il prépare déjà la venue d'une société individualiste : l'âge des symboles et celui des conventions sont passés ou sont en train de perdre de leur vertu. Le symbole exprime donc quelque chose que l'homme sent présent derrière lui, derrière sa vie, ses activités : le Divin, les dieux, le vaste et profond Ineffable, une nature des choses cachée, vivante et mystérieuse. Toutes ses institutions religieuses et sociales, tous les moments et les phases de sa vie, sont pour lui des symboles par lesquels il cherche à exprimer ce qu'il connaît ou devine des influences mystiques qui se cachent derrière son existence et façonnent ou gouvernent ses mouvements, ou du moins interviennent secrètement.

Si nous considérons les débuts de la société indienne, par exemple, l'âge védique lointain que nous ne comprenons plus car nous en avons perdu la mentalité, nous observons que tout y est symbolique. L'institution religieuse du sacrifice gouverne la société entière et toutes ses heures, tous ses moments; le rituel du sacrifice est mystiquement symbolique à chaque pas et dans chaque détail, comme nous le montre une étude même hâtive des Brâhmana et des Oupanishad. Dire que le sacrifice n'était rien autre qu'une propitiation des dieux de la Nature afin d'obtenir la prospérité en ce monde et le paradis au-delà, est l'erreur d'interprétation d'une humanité plus vieille, déjà profondément affectée par une tournure mentale intellectuelle et pratique pratique jusque dans sa religion et dans son mysticisme, jusque dans son symbolisme ­ et qui, par conséquent, ne sait plus pénétrer l'esprit ancien. Ce n'était pas seulement le culte religieux lui-même, mais les institutions sociales de l'époque qui baignaient dans l'esprit symbolique. Il existe, par exemple, un hymne du Rig Véda que l'on suppose être un hymne de mariage pour l'union d'un couple humain, et qui certainement était en usage comme tel vers la fin des temps védiques. Pourtant, le sens tout entier de l'hymne tourne autour des mariages successifs de Soûryâ, la fille du Soleil, avec différents dieux; le mariage humain est tout à fait subordonné, dominé et entièrement gouverné par l'image divine et mystique, et y est traité en fonction de cette image. Remarquons, en outre, que le mariage divin n'est pas ici, comme il le serait dans la poésie ancienne qui a suivi, une image décorative ou un ornement poétique pour rehausser et embellir l'union humaine; au contraire, l'humain est ici une représentation inférieure et une image du divin. Cette différence donne la mesure exacte du contraste complet entre la mentalité ancienne et notre façon moderne de considérer les choses. Ce symbolisme a influencé pendant longtemps les idées indiennes sur le mariage, et même maintenant on s'en souvient encore d'une façon conventionnelle, bien qu'il ne soit plus compris et ait perdu sa réalité.

Nous pouvons noter aussi, en passant, que l'idéal indien de la relation entre l'homme et la femme a toujours été gouverné par le symbolisme de la relation entre le Pourousha et la Prakriti (dans le Véda : Nri et Gna), les Principes divins masculin et féminin dans l'univers. Il existe même, jusqu'à un certain point, une corrélation pratique entre cette conception et la position de la femme. Au début des temps védiques, quand le culte symbolique conférait au principe féminin une sorte d'égalité avec le principe masculin (bien que ce dernier eût une certaine prépondérance), la femme était la compagne de l'homme autant que son auxiliaire. A une époque plus récente, quand la pensée a soumis la Prakriti au Pourousha, la femme aussi s'est mise à dépendre entièrement de l'homme; elle n'existait plus que pour lui et n'avait même presque pas d'existence spirituelle distincte. Dans la religion tântrique du shâkta, qui accorde au principe féminin la place la plus élevée, on a tenté de relever la femme et d'en faire un objet de respect profond et même d'adoration, mais cette tentative n'a pas réussi à se traduire dans les pratiques sociales, de même que le culte tântrique n'a jamais pu secouer tout à fait le joug de la pensée védântique.

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